Romain, d’étudiant est passé consultant. Et sa première mission consiste à mesurer les performances, le delivery de l’équipe. Fort de ses réflexions sur les indicateurs KVI vs KPI, ils se sent totalement à sa place.
Il se confronte pourtant à une autre réalité: celle des indicateurs-miroir.
Déambulation de Romain, hors série – partie 1 : Les chiffres disent-ils la vérité ?
Je pousse la porte du plateau.
C’est lundi matin. Les écrans affichent des colonnes vertes : temps de traitement OK, backlog sous contrôle, livraisons dans les délais.
Tout semble parfait.
Je retrouve Karim, chef de projet expérimenté. Il me serre la main avec un sourire un peu figé.
— Alors, comment ça va ?
Il hésite, puis souffle :
— Ça va… mais on est rincés.
Plus loin, je croise Julie, développeuse. Elle tape vite sur son clavier, casque sur les oreilles.
— Ça roule ? je lui demande.
Elle lève les yeux, fatiguée :
— On fait ce qu’on peut… On livre tout ce qu’on nous demande. Mais à quoi ça sert vraiment ?
Dans la salle de réunion, j’ai rendez-vous avec Vincent, leur manager.
Son ton est rassurant :
— Franchement, tout va bien. Les indicateurs sont au vert, l’équipe tient le rythme.
Je repense à Julie et Karim.
Deux mondes. Deux réalités.
En écoutant chacun, je comprends mieux ce fossé :
- Le management regarde les chiffres : délais, tickets clos, livraisons.
- L’équipe vit le quotidien : charge mentale, énergie qui baisse, sentiment d’inutilité.
Les indicateurs sont un miroir déformant.
Ils reflètent ce qu’on a choisi de mesurer, pas ce qui compte vraiment.
Le soir, en repartant, je jette un dernier coup d’œil aux écrans verts.
Je me demande combien d’organisations vivent ce décalage silencieux :
Tout va bien sur le papier… jusqu’au jour où le papier craque.
Déambulation de Romain, hors série – partie 2 : aligner les indicateurs-miroir sur la réalité
Je retrouve Romain dans une salle de réunion baignée de lumière naturelle.
Autour de lui, une grande table ovale design où se sont installés des groupes mixtes : managers, cheffe de projet, collaborateurs terrain.
Sur l’écran interactif, deux colonnes attirent le regard : KPI en vert, KVI en orange.
L’atelier miroir peut commencer.
L’atelier miroir
1️⃣ Séparer les perceptions
- L’équipe répond individuellement à deux questions :
- « Vos utilisateurs sont-ils satisfaits de la valeur que vous délivrez ? »
- « À quel prix humain, technique ou organisationnel ? »
- Les managers répondent séparément aux mêmes questions.
2️⃣ Mettre les réponses en miroir
- Les résultats sont comparés anonymement.
- Les écarts sautent aux yeux.
- Cette confrontation douce ouvre la voie à un vrai dialogue.
Les indicateurs-miroir (KPI) continuent de refléter ce qui est mesuré…
Mais, face aux réponses des équipes, ils révèlent enfin ce qu’ils ne disent pas.
Retrouver ici, la définition de Romain sur la valeur, et son cheminement d’étudiant pour comprendre les indicateurs dans leurs ensemble :
Transformer l’insight en action
Romain explique la différence :
- KPI = ce qu’on produit (volumes, délais, tickets clos).
- KVI = ce qui compte vraiment (valeur perçue, satisfaction, bien-être).
L’équipe élabore alors un tableau double regard :
- KPI pour suivre la production.
- KVI pour mesurer la valeur et l’impact humain.
Le focus de la théorie des contraintes
Pour aller plus loin, Romain partage un principe clé de la théorie des contraintes popularisée par Eliyahu Goldratt :
Dans tout système complexe, une contrainte limite la performance.
En concentrant l’action sur cette contrainte, on libère un potentiel de progrès rapide et durable.
Aligner KPI et KVI sur cette contrainte principale permet de :
- Identifier où le système coince vraiment.
- Adapter les autres processus pour soutenir ce point clé.
- Construire des indicateurs qui servent à décider, pas juste à rassurer.
Indicateurs-miroir : conclusion de l’atelier
L’atelier se termine avec un plan concret :
- Identifier un goulot réel dans la chaîne de valeur.
- Définir des indicateurs mixtes (KPI + KVI) centrés sur cette contrainte.
- Mettre en place un suivi collaboratif entre management et terrain.
Romain sourit :
« Les indicateurs-miroir ne mentent pas.
Mais quand vous les alignez sur le bon point de focale,
ils vous montrent enfin ce qui compte vraiment. »